Le jeu
A la tête de votre civilisation, vous allez essayer de la développer pour en faire la plus florissante. Art, militaire, économie, saurez-vous mener votre civilisation vers la gloire ?
Comment ça marche
Hadara est un jeu de cartes. Il existe 5 types de cartes, liées au militaire (rouge), à l’économie (jaune), à l’art (bleu), à l’agriculture (vert) et les "joker" (violet). Le jeu est divisé en 3 âges et chaque âge en 2 manches. Au début de la 1° manche d’un âge, chaque joueur pioche 2 cartes de la même couleur (mais chaque joueur pioche une couleur
différente des autres joueurs). Il choisit l’une des 2 cartes et remet l’autre au centre de la table, face visible.
Il peut ensuite, soit retirer la carte choisie du jeu pour gagner de l’argent, soit la poser devant lui en payant son coût (qui est réduit de 1 par carte de la même couleur qu’il a devant lui). Dans ce cas, il ajuste ses curseurs (les cartes font essentiellement monter des curseurs dans les 4 couleurs du jeu.
Ensuite, chaque joueur pioche 2 cartes d’une autre couleur et refait un choix parmi ces deux-là. On recommence jusqu’à ce que chaque joueur ait pioché une fois dans chaque couleur.
Ensuite, chaque joueur va gagner autant de sous que sa valeur d’économie (position du curseur jaune). Puis, tous les joueurs qui auront suffisamment de points militaires pourront récupérer une colonie (qui rapporte des points et de l’argent ou des bonus sur certaines pistes). Puis, les joueurs qui auront suffisamment de points bleu pourront sculpter un buste (cela rapporte des points et un bonus sur la piste de son choix).
Ensuite, on passe à la deuxième manche de l’âge. Cette fois-ci, chacun leur tour, les joueurs prennent une carte au centre de la table (parmi celles visibles au sommet de chaque paquet, les cartes défaussées lors de la première manche). Et, de la même manière, ils peuvent la retirer du jeu pour gagner des sous ou la poser devant eux en la payant. Puis on refait la séquence économie/militaire/art. Les joueurs vérifient ensuite si leur valeur d’agriculture (curseur vert) est supérieur ou égal à leur nombre de cartes (si ce n’est pas le cas, ils doivent défausser des cartes et reculer leurs curseurs en conséquence). Pour finir, ils peuvent acheter des sceaux qui rapporteront des points lors du décompte final.
Après les 3 âges, les joueurs comptent les points de leurs cartes, colonies, bustes, sceaux et quelques bonus éventuels pour déterminer le vainqueur.
Critique
Dès la première partie, Hadara fait indéniablement penser à 7 wonders : un jeu de civilisation rapide et accessible basé sur un simili-draft de cartes dans une partie en 3 âges, la comparaison est assez évidente. Même s’ils jouent dans la même cour, et visent globalement le même public, les sensations de jeu restent suffisamment différentes pour que les deux jeux ne fassent pas doublon.
Je trouve les règles d’Hadara plus simple à expliquer (moins d’effet de cartes, moins de cas particuliers, moins de cartes spéciales,...), mais les
parties sont un peu plus longues (2 "drafts" par âge au lieu d’un seul à 7 wonders).
Les choix de cartes à Hadara sont assez simples. Chaque carte fait avancer le marqueur de sa couleur et éventuellement un autre marqueur (sauf les cartes violettes, qui peuvent donner des bonus permanents sans faire avancer de marqueurs, ou faire avancer les 4,...), rapporte un certain nombre de points et a un coût. Il faut donc peser le pour et le contre et voir laquelle des deux cartes on choisit. Simple, et c’est ce qui rend le jeu aussi accessible. Mais le jeu peut s’avérer plus subtil si on veut regarder plus loin. Car, la carte qu’on ne choisit pas revient en jeu et pourra être prise par n’importe qui (vous y compris !). On commence alors aussi à regarder ce qui se passe à côté pour savoir s’il est bien prudent de la remettre en jeu. Et, comme à 7 wonders, on peut "jeter" une carte pour gagner des sous et être sûr que personne ne l’aura. De toutes manières, il faudra en passer par là car vous n’aurez pas assez d’argent pour poser toutes les cartes que vous voulez. Et si c’était le cas, votre niveau d’agriculture serait sûrement trop faible pour les stocker.
La première manche de chaque âge va donc vous donner accès à une carte de chaque couleur. A vous de bien faire vos choix. La seconde manche, quant à elle, va vous permettre de vous spécialiser si vous le souhaitez, car elle permet d’avoir accès à 5 cartes, 1 de chaque couleur. Les choix seront assez cornéliens, entre les cartes intéressantes, celles dont vous savez qu’elles sont dans un paquet mais pas encore accessibles, celles que vous ne voulez pas laisser aux autres. Des choix parfois difficiles, même si votre voie stratégique vous aidera à vous décider.
L’autre aspect intéressant, c’est la dualité "Spécialisation/Diversification". En effet, les joueurs oscilleront toujours entre ces deux aspects. La spécialisation permet de devenir très fort dans un domaine et, plus on se
spécialise, moins les cartes deviennent chères dans ce domaine. Au fur et à mesure de la partie, le faible coût de ces cartes vous incitera à en acheter encore et toujours plus. Attention à l’overdose !
La diversification est donc plus chère à mener, car les réductions sont moins importantes. L’équilibre se fait sur plusieurs points. Comme vous payez, en moyenne, vos cartes plus chères, vous en achetez un peu moins, ce qui limite un peu vos besoins en agriculture. A chaque âge, le coût moyen des cartes augmente. Lorsque vous vous diversifiez, vous avez des réductions sur toutes les couleurs, ce qui vous donne une certaine polyvalence dans le choix de vos cartes. Lorsque vous êtes spécialisé, il est très difficile, en Âge III, de réussir à se payer des cartes des couleurs que vous n’avez pas.
Ces aspects sont corrélés avec les sceaux, ces bonus de points de victoire que l’on peut acheter à la fin de chaque âge. Mais, plus la partie avance, plus ils coûtent cher. A la fin du premier âge, leur coût est dérisoire, mais vous êtes encore très pauvre et vous préférez souvent garder votre argent pour investir dans de nouvelles cartes et poursuivre votre développement. Il existe 2 types de sceaux : les argentés, qui valorisent la spécialisation (on peut en acheter 2, ils rapportent un nombre de points égal à la moitié de la position du curseur correspondant. Les sceaux dorés, eux, rapporte 7 points par série de 5 cartes de couleur différentes que vous aurez en fin de partie. Si vous arrivez à acheter les deux sceaux dorés, c’est donc 14 points par série.
Pour noter quelle couleur de sceau vous achetez pour les argentés (et donc quelle couleur sera valoriser en fin de partie), vous utilisez un petit jeton de couleur. Vous possédez 2 jetons de chaque couleur en début de partie. Ces jetons servent donc à choisir la couleur de vos sceaux argentés, mais aussi la couleur que vous valorisez lorsque vous sculptez un buste ou que vous achetez certaines cartes spéciales. Il faut donc
utiliser ses jetons à bon escient, car si vous utilisez les deux de la même couleur sur des bustes (ce qui va vous donner un boost dans cette couleur), vous ne les aurez plus au moment où vous souhaiterez acheter un sceau argenté. Les choix devront, là encore, être fait avec discernement.
Le jeu amène aussi une petite tension très amusante sur les colonies. Lorsque vous en récupérez une, vous devez choisir entre la garder pour gagner de l’argent ou payer pour la retourner et gagner des bonus (en points de victoire et/ou avancée de curseurs). Le dilemme est assez fort. La tentation est forte de payer pour voir, mais l’argent dépensé peut vite manquer. Ça rajoute une petite part de hasard et de prise de risque agréable. Il n’est pas rare de voir un joueur, qui n’a pas payé, regarder ce qu’il y avait au dos.
Le jeu est proposé de 2 à 5 joueurs. Je ne l’ai joué que de 3 à 5. Le jeu fonctionne bien dans toutes ces configurations. Pour les amateurs, je pense qu’il fonctionne à 2, même si ça ne doit pas être la meilleure manière de le découvrir (manque de concurrence, entre autre).
Conseils tactiques et stratégiques
Les victoires se jouent, en général, à un peu plus de 180 points. Dépasser les 200 vous assurent presque la victoire en général.
L’argent est le nerf de la guerre, vous devez éviter d’en manquer. Pour ça, les deux principaux moyens d’en avoir sont le curseur jaune et les
colonies. En effet, même s’il est tentant de les retourner pour gagner les bonus qu’elles peuvent offrir, n’oubliez pas que le différentiel entre la retourner ou pas est assez important, et ce dès la première colonie. Si vous prenez toujours l’argent et que vous récupérer les 6 colonies, vous gagnerez 31 sous (sachant que si vous payez tout le temps, il vous en coûtera 12, le différentiel est donc de 43).
Si je suis premier joueur à la première manche, j’aime bien choisir Violet comme première couleur : si je pioche une carte avec un pouvoir intéressant, cela peut orienter mon jeu pour la suite.
S’il vous reste peu d’argent, choisissez bien vos cartes. Si la carte que vous avez pioché est intéressante, mais que vous jouez plutôt sur la couleur qui vient juste derrière, il peut être préférable de jeter cette première carte pour gagner des sous et être sûr de pouvoir payer la suivante.
Lorsque vous jetez une carte, n’oubliez pas que l’autre rejoint le centre de la table et pourra être récupéré ensuite : choisissez donc avec soin celle que vous laissez en jeu et celle que vous retirez.
Gardez toujours un œil sur votre niveau d’agriculture : il est toujours
très dangereux de perdre des cartes.
Si vous n’avez pas réussi à monter suffisamment votre agriculture, n’oubliez pas que vous pouvez le faire grâce à un buste ou en tentant votre chance sur une colonie.
Souvenez-vous qu’on colonise avant de sculpter : vous pouvez donc tenter votre chance sur une colonie pour gagner le point qui vous manque en bleu, mais vous ne pourrez pas utiliser le bonus d’un buste pour coloniser dans le même tour.
Chaque carte rapporte des points, n’oubliez pas de prendre en compte ce paramètre lorsque vous choisissez vos cartes.
Les sceaux de début de partie sont vraiment peu coûteux. Évaluez toujours l’intérêt de les prendre, sans vous ralentir dans votre développement.
Si vous jouez sur la diversification, vous devez essayer d’acheter 2 sceaux dorés en ayant au moins 3 séries. En dessous, ça risque d’être trop peu.
Public
Hadara est accessible à un public assez large. Même si les règles ne sont pas triviales, elles ne sont pas plus compliquées que celles de 7 Wonders, qui est joué par beaucoup de joueurs. On est clairement dans la catégorie des jeux accessibles et demandant un peu de réflexion. Il est possible d’y jouer en famille, avec des enfants à partir de 10 ans ayant déjà essayé quelques jeux de réflexion.
Conclusion
Hadara, comme d’autres avant lui, fait partie de ces jeux pouvant permettre à des joueurs peu habitués de s’asseoir à la même table que des joueurs plus réguliers en faisant en sorte que chacun y trouve son compte en proposant des choix assez simples mais intéressants. Comme souvent dans ces jeux légers à la mécanique simple, le thème y est assez secondaire, mais le plaisir de développer sa civilisation reste présent.
Les voies stratégiques variées donnent facilement envie d’y revenir pour voir comment jouer avec un faible revenu ou en privilégiant tel ou tel aspect. L’auteur, Benjamin Schwer, a su s’appuyer sur les créations précédentes pour proposer une œuvre nouvelle, évitant certains défauts de ses illustres ancêtres.