Le jeu
Les joueurs sont de richissimes investisseurs qui vont tenter de construire le casino le plus attractif. Machines à sous, salons, boite de nuit, restaurant haut de gamme, vous ne ménagerez pas vos efforts pour attirer les clients et faire rentrer de l’argent dans les caisses. Mais la concurrence est rude et ce magnifique théâtre que vous convoitiez pourrait vous passer sous le nez. Alors, saurez-vous acheter les bons bâtiments et ainsi construire la plus beau casino ?
Comment ça marche
Chaque joueur possède un plateau individuel représentant son casino qui fait 7 cases sur 6. A gauche, il y a une échelle sur laquelle les joueurs place un marqueur "dollar" sur la case 5 et un marqueur "population" sur la case 8.
Sur le plateau principal, il y a les 3 bâtiments de base (Slots, Restaurant, Lounge) et 4 bâtiments (ou 3 à 3 joueurs) piochés au hasard qui ont un prix de base marqués par un jeton rouge. Chaque joueur commence avec 20 dollars.
Chaque tour est divis en 6 phases :
1° phase : baisse des prix. Les prix de base des bâtiments "aléatoires" baissent d’un cran (sauf au premier tour).
2° phase : renouvellement des bâtiments. S’il manque des bâtiments, on les remplace. Pour cela, on pioche une carte qui indique la forme du bâtiment (petit carré d’une case, rectangle de 2 cases ou grand carré de 4 cases) ainsi qu’un événement qui va frapper tous les joueurs. On pioche autant de cartes qu’il y a de bâtiments manquants. Si on ne peut pas renouveler les bâtiments parce que la forme de bâtiment indiqué par la carte piochée n’existe plus, la partie prend fin immédiatement.
3° phase : revenus. Les joueurs touchent tous un revenu correspondant au plus faible des deux marqueurs "dollar" et "population".
4° phase : actions. Les joueurs utilisent leur pion pour miser sur un bâtiment. Les bâtiments "aléatoires" ont un prix minimum indiqué par le marqueur. Les joueurs misent l’une des valeurs indiquées sur les cases d’enchères. On peut surenchérir sur un adversaire. A son tour, si on est en tête sur une enchère, on doit passer. S’il un ou plusieurs adversaires ont surenchérit, on doit miser ailleurs ou surenchérir pour le même bâtiments. Il existe de plus deux actions qui peuvent être choisies par plusieurs joueurs : publicité et rénovation. Lorsqu’il n’y a plus qu’un seul joueur par bâtiment ou que les joueurs sont sur les deux actions spéciales, les joueurs payent leur bâtiment et les place sur leur plateau en respectant certaines règles de concordance (on doit pouvoir atteindre le bâtiment par l’une des entrées par exemple, or les bâtiments n’ont pas de porte sur tous les cotés). L’action Rénover permet de changer la place de 2 bâtiments.
5° phase : ajustement des marqueurs. En fonction des bâtiments achetés, les joueurs vont gagner des points de victoire, de dollar ou de population.
6° phase : changement de premier joueur. Le marqueur de premier joueur passe au voisin de gauche du premier joueur du tour.
La partie prend donc fin lorsqu’on ne peut pas renouveler l’offre de bâtiment ou lorsqu’un joueur a rempli son casino. Les joueurs gagnent alors des bonus de points en fonction de ce qu’ils ont dans leur casino. Le joueur qui a le plus de points rempote la partie.
Critique
Une grosse boite excessivement tape-à-l’oeil, un éditeur américain qui fait des jeux qui ne me correspondent pas habituellement, un auteur américain inconnu, Vegas Showdown cumule les a priori négatifs au point de se dire qu’on prendra sûrement plus de plaisir à jouer à autre chose. Mais fatigué et faible, je me suis laissé tenter par une partie au milieu d’une nuit de week-end ludique. Et là, surprise ! Derrière ce qui aurait du être un pur jeu américain se cache un vrai jeu allemand. Entendez par là un jeu relativement rapide (un peu plus d’une heure), aux règles simples mais parfaitement équilibrées, avec un peu de hasard mais pas trop. Avec, en plus, un thème plutôt bien rendu. Comme quoi, l’habit ne fait pas le moine.
Vegas Showdown est un jeu relativement simple. En effet, la 4° phase représente le gros du jeu. Pour le reste, chaque phase est très rapide et très simple à jouer. Cela permet d’expliquer rapidement les règles à des néophytes et de se plonger rapidement dans le jeu. Cependant, cette simplicité n’est pas synonyme de pauvreté : en effet, la phase d’enchères offre des choix variés et demande de prendre certaines décisions cruciales. Sur quels bâtiments enchérir ? A quel prix ? Ne devrais-je pas choisir "Publicité" pour économiser de l’argent pour le prochain tour ? Est-ce que ce bâtiment intéressant sera encore là au prochain tour ?...
Chaque joueur essaye de répondre à certaines de ces questions. Les réponses seront limitées par les finances du joueur ou les choix des adversaires et l’ensemble reste donc très fluide et pas du tout prise de tête. On a donc un jeu qui offre suffisamment de choix pour satisfaire des joueurs habitués et qui reste suffisamment simple pour plaire à des joueurs occasionnels. C’est un magnifique tour de force réalisé par l’auteur.
Le design général est assez spécial : le dessin des bâtiments n’est pas très visible. On voit bien des tables dans les restaurants, des banquettes dans les salons et des gens qui se baladent dans tout ça, mais ce dessin est très léger, presque invisible, caché derrière la couleur franche du bâtiment (jaune, bleue ou verte en fonction du bâtiment). Personnellement, ça ne me gêne pas trop, les couleurs ne sont pas trop criardes et le design permet une très bonne lecture du jeu. Mais il est certain que ce n’est pas une oeuvre d’art. Par contre, les bâtiments sont des tuiles en carton fort de qualité. Les jetons en plastique sont agréables à manipuler et ne s’abimeront pas dans le temps, mais ils sont moches et seront avantageusement remplacés par des jetons de poker, faciles à trouver en ce moment, et bien plus agréables à manipuler. Pour finir, les plateaux personnels sont en papier glacé. Il est quand même dommage que ces plateaux ne soit pas plus solides. La pliure du papier est assez désagréable lors des parties. Cependant, malgré les nombreuses parties de mon exemplaire, ces plateaux ne sont pas du tout abimés et tiennent donc plutôt bien dans le temps. Mais de la part d’un éditeur américain reconnu pour faire du beau matériel, on aurait attendu des jetons pour l’argent plus "classe" et des plateaux personnels plus solides.
Malgré cela, et à l’exception de la pliure centrale des plateaux personnels, le matériel est très fonctionnel et permet de jouer facilement, les bâtiments étant parfaitement reconnaissables, ainsi que les avantages qu’ils procurent, ce qui reste l’essentiel.
Mais, ne boudons pas notre plaisir, Vegas Showdown est l’un des rares jeux capables de réunir des joueurs mordus et occasionnels offrant des parties agréables aux deux. Malgré le grand nombre de parties que j’ai joué, je prends toujours autant de plaisir à y jouer et même si l’expérience joue un rôle important, la part de hasard et l’incertitude sur les scores au cours de la partie permettent à des joueurs occasionnels de bien s’amuser. La part de hasard intervient dans l’ordre d’arrivée des bâtiments et dans les événements. Cela reste contrôlable, surtout quand on connait les événements, mais ça peut rapporter quelques points bienvenus dans certains cas. C’est donc un hasard plutôt agréable, qui permet de renouveler les parties (aussi bien sur la durée de ces dernières que sur la mise en place des bâtiments et leur conséquence sur les stratégies des joueurs) sans être trop chaotique. De plus, il ajoute une tension intéressante : quand aura lieu la fin de partie ? Le système permet de savoir à peu près quand ça va se finir, mais on peut se tromper d’un tour en fin de partie. On prend alors des risques en économisant pour le tour suivant qui n’aura peut être pas lieu ou on mise-t-on sur ce tour en espérant que le prochain n’ait pas lieu. Le suspense est garanti jusqu’au bout.
On obtient un jeu très agréable à jouer, pas trop compliqué mais demandant quand même de faire des choix (c’est toujours ce qui me plait dans un jeu) tactiques et éventuellement stratégiques. Le principal défaut du jeu reste un matériel un peu "cheap", mais le plaisir de jeu fait rapidement oublier ce défaut.
Conseils tactiques et stratégiques
Pour les scores, c’est assez variable. Ca dépend beaucoup du nombre de joueurs et de la physionomie de la partie.
N’oubliez pas que le nerf du jeu, c’est l’argent. Il est donc important d’augmenter son revenu en début de partie. Par contre, il ne faut pas le faire à tout prix et il ne faut pas hésiter à laisser passer un bâtiment pour en acheter d’autres ensuite à un prix plus abordable.
Globalement, les bâtiments jaunes sont plus petits et permettent donc un meilleur aménagement de la zone jaune. Cependant, elle est plus difficile à remplir. C’est l’inverse pour la zone bleue, dont les bâtiments sont de grande taille (aménagement plus difficile mais remplissage plus facile).
Ne négligez pas les bonus de fins de parties qui peuvent d’avérer très intéressants. Lorsque vous estimez la valeur d’un bâtiment, prenez bien en compte tous les paramètres : gain immédiat et bonus de fin de partie (augmentation des marqueurs, diamant, remplissage...).
Pensez à l’action "Rénover". Elle peut vous permettre d’acheter un bâtiments en le plaçant à une place moyenne (mais qui rapportera immédiatement ses revenus) et vous le repositionnerez ensuite grâce à cette action.
Faites bien attention à l’approche de la fin de partie pour ne pas vous faire surprendre.
Cette fin de partie intervient souvent par remplissage du casino à 3 joueurs (même si on peut finir à la pioche). A 4 joueurs, on finit plus souvent à la pioche, mais le remplissage de casino reste possible. A 5 joueurs, on finit quasiment toujours à la pioche, le remplissage de casino est quasiment impossible.
Public
Vegas Showdown s’adresse à des publics variés. En effet, ses règles simples permettent de joueur avec des joueurs occasionnels à partir de 10 ans, et la variété des parties et les choix qu’il offre font que même les joueurs plus mordus y prennent du plaisir. Cette variété de choix restent cependant suffisamment restreinte pour ne pas effrayer le joueur occasionnel. Seuls les joueurs totalement réfractaires au hasard et ceux qui n’aiment pas les jeux durant plus d’une heure auront peut être du mal avec ce jeu.
Conclusion
Règles simples, jeu rapide, thème dans l’air du temps, choix intéressants, Vegas Showdown a tout pour plaire ou presque. Il est pourtant passé relativement inaperçu au milieu de la production actuelle. Mais, avec un auteur inconnu et un éditeur dont la ligne éditoriale ne correspond pas à ce type de jeu, Vegas Showdown a sûrement eu du mal à trouver son public.
C’est bien dommage, car ce jeu est vraiment au-dessus du lot, intéressant, varié sans être trop long, et proposant des plaisirs ludiques variés capables de satisfaire un large public. Evidemment, le matériel est un peu cheap par rapport aux standards actuels, mais pas au point d’éclipser l’intérêt ludique de ce jeu.
Donc, si ce n’est pas déjà fait, courrez essayer ce jeu !